Droit matrimonial - Newsletter avril 2015
Editée par Amey L., Bohnet F., Guillod O. et Piffaretti M.
Editée par Amey L., Bohnet F., Guillod O. et Piffaretti M.
Couple non marié ; garde des enfants ; filiation ; art. 275a CC
Droit à l’information s’agissant de soins médicaux (art. 275a CC). Le droit à l’information n’est ni un droit de participation à la décision, ni un droit de contrôle. Lorsque le droit à l’information est exercé de manière contraire à son but, il peut être refusé ou retiré, comme tout autre droit (art. 275a al. 3 cum art. 274 al. 2 CC) (consid. 3.2.3).
Avis de mise en danger. Le parent ne détenant pas l’autorité parentale peut, s’il n’est pas d’accord avec le traitement médical de son enfant, adresser un avis de mise en danger de l’enfant à l’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte compétente (consid. 3.3.3).
Mariage ; étranger ; garde de l’enfant ; protection de l’enfant ; procédure ; art. 123 al. 2 let. a LTF
Demande de révision. Ne peuvent justifier une révision au sens de l’art. 123 al. 2 let. a LTF que les moyens de preuve qui portent sur des faits antérieurs à l’arrêt en question et qui existaient au moment où ils auraient pu être invoqués, mais qui, sans faute, ne l’ont pas été. Ces moyens de preuve doivent en outre être pertinents, soit de nature à conduire à une autre issue du procès. Le requérant doit avoir été empêché sans sa faute de se prévaloir de faits ou preuves pertinents dans la procédure précédente, nonobstant la diligence exercée. L’ignorance d’un fait doit être jugée moins sévèrement que l’insuffisance de preuves au sujet d’un fait connu, la partie ayant le devoir de tout mettre en œuvre pour établir celui-ci. Il y a manque de diligence lorsque la découverte de faits ou de moyens de preuve nouveaux résulte de recherches qui auraient pu et dû être effectuées dans la procédure précédente (consid. 2).
Mesures protectrices ; garde des enfants ; droit de visite ; art. 179 CC
Modification de mesures protectrices. Une modification ne peut intervenir qu’aux conditions de l’art. 179 CC, soit lorsque, depuis le prononcé des mesures, les circonstances de fait ont changé d’une manière essentielle et durable, à savoir quand un changement significatif et non temporaire est survenu après la date de la décision, quand les faits qui ont fondé le choix des mesures se sont révélés faux ou ne se sont par la suite pas réalisés comme prévu, ou encore quand la décision s’est avérée plus tard injustifiée parce que le juge appelé à statuer n’a pas eu connaissance de faits importants (consid. 4.2).
Notion de « garde alternée » et distinction avec le droit de visite. La garde alternée est la situation dans laquelle les parents exercent en commun l’autorité parentale, mais prennent en charge l’enfant de manière alternée pour des périodes plus ou moins égales. Dès lors, l’accord prévoyant que les enfants se rendent un week-end sur deux chez leur père ainsi qu’un seul jour par semaine institue un droit de visite élargi et non une garde alternée (consid. 4.3).
Mesures protectrices ; entretien ; revenu hypothétique ; art. 176 al. 1 ch. 1 CC
Fixation d’un revenu hypothétique. Le fait qu’une personne perçoive des indemnités de l’assurance-chômage ne permet pas encore de retenir qu’elle a entrepris tout ce qu’on pouvait raisonnablement exiger d’elle pour éviter de se trouver sans revenus et, partant, qu’elle a fait des recherches pour retrouver un emploi. Il s’agit seulement d’un indice en ce sens. Le cas échéant, il revient au juge d’examiner, sur la base des critères établis en droit de la famille, si l’on peut imputer un revenu hypothétique au débirentier (consid. 5).
Mesures protectrices ; entretien ; procédure ; art. 285 CC ; 271, 296 al. 3, 314 al. 2 CPC
Principe de l’interdiction de la reformatio in pejus. Selon le principe de l’interdiction de la reformatio in pejus une autorité de recours ne peut pas modifier l’arrêt attaqué au détriment de la partie qui a recouru, sauf si la partie adverse a interjeté un recours joint. Lorsque la procédure sommaire est applicable, comme en cas de mesures protectrices de l’union conjugale, l’appel joint n’est précisément pas ouvert (art. 314 al. 2 CPC en lien avec l’art. 271 CPC), de sorte que l’intimée ne saurait se prévaloir dudit principe (consid. 5.2).
Contribution d’entretien des enfants. Même lorsque la situation des parents est particulièrement favorable, la contribution d’entretien en faveur des enfants doit être calculée sur la base de leurs besoins concrets (consid. 6.2).
Mesures protectrices ; entretien ; procédure ; art. 176 al. 1 ch. 1 CC ; 98 et 106 LTF
Principe d’allégation (rappel). En tant que mesures provisionnelles au sens de l’art. 98 LTF, le prononcé de mesures protectrices de l’union conjugale (art. 172ss CC) ne peut être attaqué que pour violation des droits constitutionnels. Un tel grief doit être invoqué et motivé conformément au principe d’allégation (consid. 2.1). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont contraires au droit ou entachées d’une erreur indiscutable, c’est-à-dire arbitraires au sens de l’art. 9 Cst. Le Tribunal fédéral se montre réservé en ce qui concerne l’appréciation des preuves et la constatation des faits, vu le large pouvoir qu’il reconnaît en la matière à l’autorité cantonale (consid. 2.2).
Divorce ; mesures provisionnelles ; garde des enfants ; procédure ; art. 296 al. 1 CPC
Demande d’expertise. Dans le cadre de mesures protectrices ou de mesures provisoires, il s’agit de créer le plus rapidement possible une situation optimale pour les enfants. De longues clarifications, notamment par une expertise ne doit pas constituer la règle, même en situation de conflit. Une expertise ne devrait être ordonnée que dans des situations particulières (telles qu’un abus sexuel ou d’autres violences contre les enfants). Le tribunal du fond ayant pu se forger un avis sur la base des preuves administrées, son refus d’administrer d’autres moyens de preuve ne viole pas la maxime inquisitoire (art. 296 al. 1 CPC) (consid. 2.3).
Application du nouveau droit sur l’autorité parentale. Il n’y a pas violation des droits constitutionnels, lorsqu’un tribunal supérieur n’applique pas le nouveau droit sur l’autorité parentale à un jugement antérieur à l’entrée en vigueur de ladite révision et que ce droit révisé constitue un changement fondamental du système ne devant pas être pris en compte de manière anticipée (cf. l’arrêt 5A_92/2014 du 23 juillet 2014) (consid. 7).
Divorce ; mesures provisionnelles ; entretien ; art. 125 CC
Revenu complémentaire d’une activité dépassant le taux d’occupation exigible. Dans le cadre de mesures protectrices de l’union conjugale, le conjoint n’est pas tenu de travailler plus que le taux d’occupation exigible (par exemple 50%). Un éventuel surplus de salaire doit lui revenir entièrement, sans être pris en considération pour la fixation de l’entretien. Ce principe vaut lorsque les revenus (sans le surplus) des époux suffisent à couvrir les besoins familiaux des deux ménages, mais pas lorsque la famille est en situation de manque (consid. 2.3).
Sort de dettes personnelles. L’obligation d’entretien de la famille passe avant les dettes personnelles d’un époux (même les créances fiscales) qui ne sont pas comprises dans le calcul du minimum vital. Ces dettes seront prises en considération par le juge lors du partage d’un éventuel excédent. Sont donc ajoutées au minimum vital en principe uniquement les dettes régulièrement acquittées et qui avaient été contractées pour l’entretien de la famille (consid. 4.2).
Divorce ; mesures provisionnelles ; entretien ; revenu hypothétique ; art. 125, 129 CC
Modification de la contribution d’entretien (art. 129 CC). La scolarisation de l’enfant cadet est un changement de situation qui n’est pas déterminant pour la fixation de la contribution d’entretien. Selon la jurisprudence constante (cf. ATF 115 II 6), une activité à temps partiel ne pourra être exigée que lorsque l’enfant cadet aura atteint sa dixième année de vie (consid. 2.1).
Confirmation de jurisprudence. Les conditions d’un revirement de jurisprudence ne sont pas données s’agissant de la fixation de la contribution d’entretien en lien avec le taux d’activité professionnelle exigible du parent créancier. Cette jurisprudence a été récemment confirmée (notamment ATF 138 III 97 et arrêt 5A_506/2014 du 23 octobre 2014) (consid. 3.2 et 3.3).
Divorce ; entretien ; revenu hypothétique ; art. 125 al. 1, 285 al. 1 CC
Contribution d’entretien en faveur des enfants en cas de situation financière confortable. En cas de situation financière particulièrement bonne, il n’est pas nécessaire de prendre en considération toute la force contributive du débirentier. Pour fixer la contribution d’entretien des enfants, il faut donc en principe se baser sur les besoins effectifs des enfants (consid. 4.4).
Fixation de l’entretien maximal de l’épouse. Le standard de vie choisi d’un commun accord constituant la limite supérieure du droit à l’entretien, il n’est pas admissible comme l’a pourtant fait l’autorité cantonale d’ajouter aux charges nécessaires au maintien du train de vie antérieur de l’épouse un montant de CHF 1'000.- par mois, sous prétexte qu’il faudrait lui assurer des conditions de vie correspondant davantage à la fortune et aux revenus dont disposait l’ex-époux, qu’au train de vie modeste adopté par les époux durant la vie commune (consid. 5.4).
Revenu hypothétique de l’épouse. Dans la mesure où l’épouse a exercé une activité à temps partiel durant la vie commune et que la situation financière du père est particulièrement favorable, il ne saurait être exigé de l’épouse une augmentation de son taux d’activité avant que le cadet des enfants ait atteint l’âge de 16 ans (consid. 5.6.2).
Divorce ; procédure ; art. 117ss CPC ; 163 CC
Assistance judiciaire. La partie qui ne dispose pas des moyens suffisants pour assumer les frais d’un procès, mais dont le conjoint est en mesure de prendre en charge ces frais, ne peut pas requérir de l’Etat l’octroi de l’assistance judiciaire. De jurisprudence constante, le devoir de l’Etat d’accorder l’assistance judiciaire est subsidiaire par rapport à l’obligation d’entretien découlant du droit de la famille (cf. ATF 138 III 672) (consid. 2 et 3.1).
Modification d’un jugement de divorce ; entretien ; revenu hypothétique ;art. 125, 129, 286 CC
Fixation d’un revenu hypothétique. Lorsque le juge, dans le cadre de la fixation d’une contribution d’entretien, entend imputer à l’un des époux un revenu hypothétique, il doit généralement lui accorder un délai approprié pour s’adapter à sa nouvelle situation. Il n’est donc pas arbitraire de fixer un délai de 18 mois à une épouse, âgée de 42 ans, s’étant chargée de l’éducation des enfants et de la tenue du ménage durant la vie commune, résidant dans la région lémanique, sans formation professionnelle complète et n’exerçant pas une activité de cadre, pour obtenir un revenu lui permettant de couvrir ses propres besoins et de participer à l’entretien des enfants dont la garde a été accordée au père (consid. 3.1 et 3.2).
Interprétation de la convention sur les effets accessoires du divorce. En tant que manifestation de volonté, la convention sur les effets accessoires du divorce doit être interprétée selon les mêmes principes juridiques que les autres contrats. En l’espèce, il y a lieu de déduire de la convention prévoyant la prise en charge des intérêts hypothécaires par le père aussi longtemps que la mère occupe personnellement l’appartement avec les enfants que les parties entendaient limiter l’obligation financière du père jusqu’à ce que les enfants ne résident dans les faits plus avec leur mère - et non à partir du jour du jugement définitif supprimant la garde alternée (consid. 4.1.1. et 4.2).
Modification d’un jugement de divorce ; entretien, prévoyance vieillesse ; art. 279 CPC
Convention sur les effets accessoires du divorce. Les époux peuvent conclure une telle convention au moment du divorce ou ultérieurement pour modifier la réglementation résultant du jugement de divorce. Avant d’homologuer la convention, le juge doit simplement s’assurer que les époux l’ont conclue après mûre réflexion et de leur plein gré, qu’elle est claire et complète et qu’elle n’est pas manifestement inéquitable (consid. 3).
Couple non marié ; garde des enfants ; procédure ; art. 450 al. 2 ch. 1 CC ; 29 al. 3 Cst.
Assistance judiciaire (art. 29 al. 3 Cst.). Une cause est dépourvue de chances de succès lorsque les perspectives de la gagner sont notablement plus faibles que les risques de la perdre, de sorte qu’une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s’y engager, en raison des frais qu’elle s’exposerait à devoir supporter. En revanche, l’assistance judiciaire est envisageable quand les chances de succès et les risques d’échec s’équilibrent à peu près, ou que les premières ne sont que légèrement inférieures aux secondes (consid. 3.2).
Qualité pour recourir (art. 450 al. 2 ch. 1 CC). La qualité pour recourir est admise pour les personnes parties à la procédure pour autant qu’un intérêt actuel existe. Cet intérêt n’existe plus quand le parent qui s’était vu refuser le droit de partir à l’étranger avec l’enfant a néanmoins déjà effectué ce voyage (consid. 3.3.1).
Couple non marié ; mesures de protection de l’enfant ; droit de visite ; art. 314a CC
Droit de l’enfant d’être entendu (art. 314a CC). Des auditions à répétition doivent être évitées quand elles constitueraient une charge inacceptable pour l’enfant, ce qui peut notamment être le cas en situation de conflit de loyauté. Le principe vaut a fortiori lorsque la nouvelle audition n’est pas susceptible d’apporter de nouvelles conclusions ou lorsque son utilité n’est pas en proportion raisonnable avec la charge imposée à l’enfant (cf. aussi ATF 133 III 553) (consid. 2.2).
Couple non marié ; protection de l’enfant ; art. 308 al. 1 et 2 CC ; 8 CEDH
Dispense de fréquentation scolaire. Un psychiatre consulté à titre privé n’est pas compétent pour dispenser un enfant de la fréquentation scolaire. Les cours à domicile sont soumis à autorisation du Département compétent. Seules des personnes remplissant les mêmes conditions d’aptitude à l’enseignement que le corps professoral de l’école publique, sont autorisées à enseigner à domicile (consid. 2).
Curatelle éducative. Une curatelle fondée sur l’art. 308 CC va plus loin que la surveillance éducative de l’art. 307 CC et ne peut donc être instaurée que si le développement de l’enfant est menacé et que cette menace ne peut pas être écartée par les parents ou par des mesures moins incisives fondées sur l’art. 307 CC (consid. 4.3).
Droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH). Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que si cette ingérence est prévue par la loi et constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui (art. 8 § 2 CEDH). C’est le cas d’une mesure de protection de l’enfant fondée sur l’art. 308 CC (consid. 5).
Couple non marié ; filiation ; art. 8 CEDH ; 275a CC
Droit à l’information (art. 275a CC). L’intérêt des enfants commande en l’espèce que leur lieu de résidence et de scolarisation ne soient pas communiqués à leur père, du fait que celui-ci est prévenu d’instigation à assassinat sur leur mère et qu’il se trouve en détention provisoire depuis deux ans pour ces faits. Cette limitation du droit à l’information se justifie d’autant plus qu’un risque de récidive n’est pas totalement exclu et que les enfants refusent pour le moment de reprendre des relations personnelles avec leur père. La mère devra néanmoins transmettre au père, par l’intermédiaire de leurs avocats respectifs, toute information relative aux événements particuliers survenant dans la vie des enfants ainsi qu’à leur évolution scolaire, de même que la correspondance entre lui et les enfants (consid. 5.1 et 5.2).
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