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Droit matrimonial - Newsletter janvier 2019

Editée par Bohnet F., Burgat S., Dreni I., Guillod O., Saint-Phor J.


Protection de l'enfant

Une chronique sur les nouvelles dispositions du Code civil en matière de protection de l'enfant vous est proposée par Sabrina Burgat.

Pour en savoir plus

Mesures protectrices

Mesures protectrices

TF 5A_629/2017 et 5A_668/2017 (d) du 22 novembre 2018

Mesures protectrices; couple; entretien; liquidation du régime matrimonial; art. 163, 176, 236 CC

Moment de la dissolution du régime matrimonial (art. 236 CC). Le régime matrimonial de la communauté de biens est dissous au moment de la création de la litispendance par le dépôt d’une requête en divorce ou le prononcé judiciaire ordonnant la séparation de biens. En l’espèce, la recourante n’a pas suffisamment motivé les raisons qui auraient justifié de ne pas donner suite à la requête de séparation de biens du mari, déposée près de deux ans avant le dépôt de la requête en divorce (consid. 4.3 et 4.5).

Calcul de la contribution en cas de cessation de la vie commune (art. 163 et 176 CC). Rappel des principes. La loi ne prescrit aucune méthode de calcul. Sont à disposition la méthode concrète en une étape (détermination du niveau de vie du crédirentier) ou la méthode en deux étapes (partage du disponible). La méthode en une seule étape convient à des situations financières supérieures à la moyenne. La méthode en deux étapes est appropriée pour toute situation financière – le cas échéant malgré de bons moyens financiers – dans laquelle les époux n’ont réalisé aucune économie lorsque l’épargne réalisée est absorbée par l’augmentation des frais qu’entraîne le divorce (ATF 140 III 337). Le Tribunal fédéral laisse la question ouverte de savoir si une approche forfaitaire grossière, par exemple pour l’attribution du quintuple montant de base, correspond au sens et à l’esprit de la méthode en une étape (consid. 6.3).

Utilisation de la fortune des époux. Si durant la vie commune les époux ont vécu au moyen de leur fortune et que, en raison d’un rendement insuffisant de la fortune, elle a été vidée de sa substance, il est également raisonnable de s’attendre à ce qu’il en aille de même après la séparation, si cela est nécessaire pour maintenir le niveau de vie vécu jusqu’alors (consid. 6.7).

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TF 5A_848/2018 (f) du 16 novembre 2018

Mesures protectrices; garde des enfants; procédure; art. 176 al. 3, 179 al. 1 CC; 276 al. 1 CPC

Rappel des critères d’attribution de la garde de l’enfant (art. 176 al. 3 CC). Le juge du fait dispose d’un large pouvoir d’appréciation (consid. 5.1.1). L’attribution de la garde doit uniquement viser à servir le bien de l’enfant, et non à sanctionner un des parents pour son attitude (consid. 5.3).

Modification des mesures provisionnelles en cas de changement des circonstances d’une manière essentielle et durable (art. 179 al. 1 CC ; 276 al. 1 CPC). S’agissant de la réglementation de la garde et des relations personnelles, il suffit que le pronostic du juge se révèle erroné et que le maintien de la réglementation actuelle risque de porter atteinte au bien de l’enfant et le menace sérieusement. Le fait nouveau est important et suffisant pour modifier le jugement lorsqu’un tel changement apparaît comme nécessaire pour répondre au bien de l’enfant. La nouvelle réglementation doit ainsi s’imposer impérativement, en ce sens que le mode de vie actuel nuit plus au bien de l’enfant que le changement de réglementation et la perte de continuité dans l’éducation et les conditions de vie qui en est consécutive (consid. 5.1.2).

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Divorce

Divorce

TF 5A_103/2018 et 5A_111/2018 (d) du 6 novembre 2018

Divorce; autorité parentale; droit de visite; protection de l’enfant; art. 273 al. 1, 274 al. 2, 298 al. 1 CC

Autorité parentale. Cas dans lesquels l’attribution de l’autorité parentale exclusive à un parent suite à un divorce est justifiée (art. 298 al. 1 CC). Rappel des principes (consid. 2.1).

Droit aux relations personnelles. Rappel des principes (art. 273 al. 1 et art. 274 al. 2 CC). Dans le cadre d’un divorce, une réglementation durable des relations personnelles entre un enfant et son parent doit en principe être adoptée, même si celle-ci doit être ultérieurement modifiée. Le bien de l’enfant est le principe directeur pour fixer l’étendue de ces relations. Il faut également prendre en compte les conditions de logement du parent détenteur d’un droit de visite ainsi que la relation de l’enfant avec ses deux parents. En effet, l’objectif est d’empêcher, aux yeux de l’enfant, une stigmatisation du parent qui ne détient pas l’autorité parentale et de tenter de normaliser les relations. Dans certaines circonstances, il peut être opportun de commencer par établir temporairement un simple droit de visite accompagné, en assurant un rapprochement en douceur entre le parent qui ne détient pas l’autorité parentale et l’enfant, avant d’assouplir le cadre (en retirant l’accompagnement) et d’étendre dans le temps le droit de visite dans les limites fixées par le tribunal (consid. 3.3.1).

Protection de l’enfant. Le jugement de divorce peut prévoir une extension ultérieure du droit de visite, si celui-ci doit être initialement accompagné (consid. 3.3.2). Dans cette étape initiale, une interdiction d’approcher peut être ordonnée à l’égard du parent détenteur du droit de visite, en dehors des visites accompagnées, à titre de mesure de protection de l’enfant. La mesure permet de protéger l’enfant d’une rencontre forcée avec son parent en dehors du cadre prescrit par le curateur. L’art. 274 al. 2 CC permet également de lier le droit de visite à la protection de l’enfant (consid. 4.1).

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TF 5A_469/2018 (d) du 14 décembre 2018

Divorce; droit de visite; audition de l'enfant; art. 133 al. 2, 273 CC

Droit de visite – Refus de l’enfant de voir un parent. La volonté de l’enfant doit être prise en compte pour fixer le droit de visite et déterminer si les visites doivent avoir lieu. Lorsque les enfants refusent tout contact avec un parent, il est plus prudent de gagner la confiance des enfants au moyen de lettres et de cadeaux, afin d’établir gentiment ces contacts, et permettre ensuite au parent d’exercer effectivement son droit de visite. En effet, une telle approche par petits pas est plus prometteuse sur le long terme (consid. 3).

Prise en compte de la volonté de l’enfant en fonction de son âge. C’est à partir de l’âge de 12 ans qu’un enfant est apte à se forger une opinion de manière autonome en ce qui concerne les relations personnelles avec le parent qui ne détient pas la garde. Or, la volonté exprimée par un enfant un peu plus jeune ne doit pas être ignorée, mais doit au contraire être prise en compte en fonction de l’âge de l’enfant (consid. 4.2).

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TF 5A_395/2018 (f) du 3 décembre 2018

Divorce; revenu hypothétique; entretien; art. 285 al. 1 CC

Revenu hypothétique. Rappel des principes (consid. 3.3.1). En l’espèce, imputation d’un revenu hypothétique à un père pour lequel il n’apparaissait pas qu’il avait fourni les efforts que l’on pouvait raisonnablement exiger de lui afin de retrouver un emploi plus rémunérateur que celui qu’il occupait en qualité d’animateur parascolaire. Imputation d’un revenu hypothétique de CHF 4'504.- par mois.

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TF 5A_501/2018 (d) du 22 novembre 2018

Divorce; entretien; mesures provisionnelles; procédure; art. 129 al. 1, 179 al. 1 CC; 276 al. 1 CPC

Modification des mesures provisionnelles durant la procédure de divorce (art. 276 al. 1 CPC). Modification de l’entretien. Rappel des principes. Une adaptation des mesures provisionnelles est possible, lorsque les relations ont changé de manière conséquente et durable depuis l’entrée en force de la décision à modifier (art. 179 al. 1 en lien avec l’art. 129 al. 1 CC). Une modification est également possible lorsque les circonstances effectives, sur lesquelles s’est fondée la décision prononçant les mesures, s’avèrent ensuite inexactes ou ne se concrétisent pas comme prévu. Enfin, un époux peut demander une modification, lorsque la décision initiale s’avère injustifiée parce que le tribunal qui a pris les mesures n’avait pas connaissance de faits importants. Pour qu’une modification soit admise, il faut que les changements n’aient pas été prévisibles au moment où la décision a été prise. Une demande de modification ne peut pas être fondée sur le fait que les circonstances initiales ont été mal appréciées en droit ou en fait, sur la base des faits allégués et des preuves offertes. La procédure de modification n’a pas pour but de corriger la première décision, mais bien de l’adapter aux changements de circonstances intervenus (consid. 2).

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TF 5A_360/2018 (f) du 4 décembre 2018

Divorce; liquidation du régime matrimonial; art. 197 ss, 960 al. 1 CC; 96, 101 LP; 3 ORFI

Effet du versement anticipé (art. 197 ss CC). Jusqu’à la survenance d’un cas de prévoyance, le versement anticipé, qui se rapporte à une expectative, est considéré comme un prêt de l’institution de prévoyance et ne doit dès lors pas être comptabilisé dans le régime matrimonial. Il n’exerce aucune influence sur le rattachement de l’immeuble à l’actif d’une des masses de l’acquéreur, puisque le rattachement obéit aux règles ordinaires (art. 197 ss CC) (consid. 3.1).

Transfert de la part de copropriété de l’époux sur un immeuble grevé de restrictions d’aliéner au registre foncier du fait de saisies ordonnées par l’Office des poursuites (960 al. 1 ch. 2 CC ; 96, 101 LP ; 3 ORFI). Il est interdit au débiteur de disposer de biens saisis sans la permission du préposé (art. 96 LP). Malgré la saisie, le débiteur conserve sa capacité civile et, jusqu’à la vente, il reste propriétaire de ses biens. Il peut donc valablement conclure des actes juridiques impliquant les biens saisis, avec pour seule limitation son pouvoir de disposer. Sans l’autorisation du préposé, la conclusion de l’acte générateur d’obligation sur un bien saisi reste valable mais son exécution (par ex. le transfert) est inopposable aux créanciers saisissants, pour autant que cela lèse leurs droits (consid. 3.4.3.1). S’agissant d’un immeuble, la saisie entraîne une restriction du droit d’aliéner (101 LP ; 960 al. 1 ch. 2 CC) avec annotation au registre foncier (art. 3 ORFI) (consid. 3.4.3.2). Un jugement de divorce prévoyant le transfert de la part de copropriété d’un époux, qui fait l’objet de plusieurs avis de saisie, ne peut pas être exécuté, la gravité de ce vice conduisant à la nullité de la décision (consid. 3.4.3.3 et 3.4.4).

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TF 5A_426/2018 (d) du 15 novembre 2018

Divorce; couple; procédure; art. 283 al. 1 CPC

Décision partielle limitée au principe du divorce. Comme l’a affirmé le Tribunal dans l’ATF 144 III 298, le principe de l’unité du jugement de divorce selon lequel le tribunal prononce le divorce et règle également les effets de celui-ci dans sa décision (art. 283 al. 1 CPC) n’exclut pas une décision partielle limitée au principe du divorce, lorsque les deux époux consentent à une telle décision ou lorsque l’intérêt de l’un des époux à obtenir une décision partielle limitée au principe du divorce est supérieur à l’intérêt de l’autre conjoint à obtenir une décision unique réglant tant le principe du divorce que les effets de celui-ci. Dans la pesée des intérêts, il faut tenir compte de l’importance du principe du divorce pour les effets du divorce (consid. 2.3).

Pesée des intérêts. Le prononcé d’un jugement partiel sur le principe du divorce n’a pas d’effets sur le devoir de renseigner des époux (art. 170 CC), ni sur la liquidation du régime matrimonial (art. 120 al. 1 CC), le partage de la prévoyance professionnelle (art. 122 CC), l’entretien après le divorce (art. 125 CC) ou les droits et devoirs des parents conformément aux dispositions sur les effets de la filiation (art. 133 al. 1 CC), indépendamment de savoir si ces points ont déjà été réglés ou non (consid. 3.1).

Le droit au remariage est déterminant au regard des motifs du divorce, de la durée de la procédure de divorce et d’autres circonstances pertinentes (comme le droit successoral, les enfants issus d’une nouvelle relation, l’âge des parties). S’agissant de savoir si le litige relatif aux effets du divorce dure trop longtemps, seule la durée effective de la procédure est importante, et non pas la conduite de la procédure par le tribunal. A ce titre, il convient d’estimer la durée attendue de la procédure (consid. 2.3). Ainsi, un jugement partiel sur le principe du divorce ne peut être admis que si la durée excessive de la procédure est imputable au tribunal qui statue ou à la partie adverse (consid. 2.4). Le risque selon lequel, après le jugement partiel, la partie qui souhaitait divorcer rapidement n’ait plus d’intérêt à régler rapidement les effets du divorce peut être limité par une conduite appropriée du procès par le tribunal (art. 124 CPC) (consid. 3.2.1).

Un jugement partiel sur le principe du divorce peut se justifier par le droit au mariage, en particulier le droit au remariage (cf. art. 14 Cst.), s’il y a un accord sur le principe du divorce et que le litige sur les effets du divorce dure depuis longtemps (consid. 3.3.1).

Un époux ne peut pas se prévaloir de bonne foi de sa qualité d’héritier légal (art. 462 et 471 al. 3 CC) pour refuser un jugement partiel. Il n’est pas jusitifé de maintenir plus longtemps le lien du mariage, si la communauté conjugale a cessé depuis plusieurs années. En effet, les règles successorales applicables aux époux et leur droit à une réserve légale se fondent sur l’union conjugale (art. 159 CC), et donc sur les relations familiales entre les parties (consid. 3.2.2).

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Couple non marié

Couple non marié

TF 5A_403/2018 (d) du 23 octobre 2018

Couple non marié; autorité parentale; audition de l’enfant; procédure; art. 299, 307, 308, 310, 314abis CC; 299 CPC; 14, 36 Cst.

Représentation de l’enfant dans le cadre d’une procédure devant l’APEA (art. 314abis CC) ou dans une procédure matrimoniale (art. 299 CPC). Rappel de principes (consid. 4.1.2). Même dans le cas d’un placement externe de l’enfant qui porte une atteinte à ses droits strictement personnels, la désignation d’un représentant pour l’enfant n’est pas impérativement nécessaire (consid. 4.1.3).

Retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant (art. 310 CC). Le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant constitue une restriction au droit fondamental au mariage et à la famille (art. 14 Cst.), qui repose sur la base légale de l’art. 310 al. 1 CC conformément à l’exigence posée à l’art. 36 al. 1 Cst. Cette mesure, comme toutes les mesures de protection de l’enfant doit être examinée à l’aune du principe de proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.) (consid. 5.2).

Conditions du retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant (art. 310 CC). Le retrait de ce droit n’est possible que si la mise en danger de l’enfant ne peut être combattue par d’autres mesures conformément aux art. 307 et 308 CC, selon les principes de proportionnalité et de subsidiarité. Lorsque la mise en danger de l’enfant ne peut être écartée autrement, l’autorité de protection retire aux parents le droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant et le transfert à l’autorité de protection de l’enfant. Une telle mesure se justifie lorsque les parents n’offrent pas un environnement protégé ou destiné à favoriser le développement physique, mental et moral de l’enfant. Peu importe les causes de la mise en danger et la question de savoir si les parents en sont responsables ou non (consid. 5.3).

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TF 5A_493/2018 (f) du 5 novembre 2018

Couple non marié; droit de visite; procédure; art. 9 Cst.; 276 al. 1 CC

Appréciation d’une expertise familiale sous l’angle de l’arbitraire (art. 9 Cst.). Lorsque l’autorité compétente se rallie au résultat d’une expertise, en l’occurrence une expertise familiale, une appréciation arbitraire des preuves ne peut être retenue que si l’expert n’a pas répondu aux questions, si ses conclusions sont contradictoires ou si, de quelle qu’autre manière, l’expertise est entachée de défauts à ce point évidents et reconnaissables qu’il n’était tout simplement pas possible de les ignorer (consid. 5.2.1). Il n’est en principe pas insoutenable de privilégier l’opinion émise par des experts choisis par l’autorité judiciaire plutôt que l’avis d’un médecin traitant ou privé (consid. 5.2.2).

Fixation du droit aux relations personnelles (art. 273 al. 1 CC). L’appréciation des circonstances de fait pour fixer le droit aux relations personnelles est une question de droit. Le Tribunal fédéral s’impose toutefois une certaine retenue. Le juge du fait qui, par son expérience en la matière, connaît mieux les parties et le milieu dans lequel l’enfant évolue, dispose d’un large pouvoir d’appréciation. Le Tribunal fédéral n’intervient que si le juge a écarté, sans aucun motif, des critères essentiels ou, à l’inverse, s’est fondé sur des éléments dépourvus d’importance au regard du bien de l’enfant ou contrevenant aux principes du droit fédéral (consid. 6.2.1).

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