Droit matrimonial - Newsletter mars 2013
Editée par Bohnet F., Burgat S. et Guillod O.
Editée par Bohnet F., Burgat S. et Guillod O.
Mesures protectrices ; protection de l’enfant ; notion de résidence habituelle de l’enfant ; art. 85 LDIP ; 19 ss CLaH 61 ; 5, 7 CLaH 96
Compétence des autorités suisses. Selon l’art. 85 al. 1 LDIP, la loi applicable ainsi que la reconnaissance et l’exécution des décisions ou mesures étrangères sont régies, en matière de protection des mineurs, par la CLaH 96, en ce qui concerne les mesures de protection de l’enfant. Cette convention régit l’attribution de l’autorité parentale, le règlement de la garde et des relations personnelles, ainsi que l’instauration d’une curatelle. La CLaH 61 continue à s’appliquer dans les relations entre la Suisse et les Etats qui n’ont pas ratifié la CLaH 96. Lorsqu’un Etat n’a ratifié ni la CLaH 96 ni la CLaH 61, c’est la première qui s’applique, compte tenu du renvoi général de l’art. 85 al. 1 LDIP (consid. 2.3.1).
Changement de résidence de l’enfant. En cas de changement de la résidence habituelle de l’enfant dans un autre Etat contractant, le principe de la perpetuatio fori ne s’applique pas (art. 5 et 7 CLaH 96). En revanche, lorsque la nouvelle résidence habituelle de l’enfant se trouve dans un Etat non contractant, la compétence de l’autorité saisie peut être conservée, dans le sens de la perpetuatio fori (consid. 2.3.2).
Résidence habituelle. Rappel de la notion de résidence habituelle de l’enfant (consid. 2.3.3).
Application au cas d’espèce. En l’espèce, dans la mesure où les USA ne sont pas partie à la CLaH 61 et n’ont pas encore ratifié la CLaH 96, c’est la CLaH 96 qui s’applique. Partant, il sufit que l’enfant ait eu sa résidence habituelle en Suisse au moment du dépôt de la requête de modification des mesures protectrices de l’union conjugale pour que la compétence des autorités suisses soit admise.
Mariage ; refus de célébrer le mariage ; art. 97a CC
Droit au mariage. Le droit au mariage, garanti par l’art. 14 Cst., protège les particuliers contre les mesures étatiques qui limiteraient de manière injustifiée la faculté de se marier et le choix du conjoint. Ce droit fondamental peut faire l’objet de restrictions, dans la mesure où celles-ci ne portent pas atteinte à l’essence même de ce droit. L’art. 97a CC permet à l’officier de l’état civil de refuser son concours à la célébration d’un mariage si l’un des fiancés ne veut manifestement pas fonder une communauté conjugale, mais éluder les dispositions sur l’admission et le séjour des étrangers. Il ne vise qu’à faire obstacle à un exercice abusif du droit au mariage, dans un but dévoyé (consid. 3.1-3.2).
Refus de l’officier de l’état civil. Selon l’art. 97a CC, l’officier de l’état civil peut refuser son concours à la célébration du mariage lorsque l’un des fiancés ne veut manifestement pas fonder une communauté conjugale, mais éluder les dispositions sur l’admission et le séjour des étrangers. Rappel des conditions permettant un refus (consid. 4.2).
Mesures protectrices ; entretien ; art. 176 CC
Fixation de la contribution d’entretien. Lors de la fixation de la contribution d’entretien, le juge doit en principe tenir compte des revenus effectifs. Il peut toutefois imputer à un époux un revenu hypothétique, dans la mesure où celui-ci pourrait le réaliser en faisant preuve de bonne volonté et en accomplissant l’effort qui peut être raisonnablement exigé de lui. La détermination du revenu qu’un époux a la possibilité effective de réaliser est une question de fait (consid. 4.1).
Prise en compte d’un revenu hypothétique. La prise en considération du revenu tiré d’une activité à temps partiel, sans adaptation pour déterminer un salaire hypothétique pour la même activité à plein temps est une inadvertance manifeste qui constitue une constatation de fait arbitraire lorsque le revenu mensuel brut retenu dans la décision contestée correspond à une activité à taux variable partiel et que l’autorité considère que l’époux concerné peut travailler à plein temps (consid. 4.3).
Mesures protectrices ; procédure ; art. 98 LTF ; 179 CC
Pouvoir de cognition du Tribunal fédéral. La décision de séparation de biens judiciaire selon l’art. 176 CC constitue une mesure provisionnelle au sens de l’art. 98 LTF, car elle conserve un caractère provisoire. Le régime précédent peut en effet être rétabli sur requête, en cas de fait nouveau. Partant, seule la violation de droits constitutionnels peut être invoquée devant le Tribunal fédéral (consid. 2.1.2).
Effet des mesures provisionnelles. Lorsque des mesures provisionnelles ont été ordonnées durant la procédure de divorce et que cette procédure prend fin sans jugement, ces mesures déploient leurs effets tant que les époux demeurent séparés et jusqu’à leur éventuelle modification par le juge des mesures protectrices de l’union conjugale, aux conditions de l’art. 179 CC, c’est-à-dire si, depuis leur prononcé, les circonstances de fait ont changé d’une manière essentielle et durable (consid. 3).
Divorce ; mesures provisionnelles ; droit de garde ; effet suspensif ; art. 75 LTF
Mesures superprovisionnelles. Une décision de mesures superprovisionnelles n’est pas en principe une décision de dernière instance cantonale au sens de l’art. 75 al. 1 LTF. La possibilité d’obtenir une ordonnance de mesures provisionnelles qui se substitue au prononcé d’extrême urgence constitue un moyen de droit cantonal avant l’épuisement duquel le recours en matière civile au Tribunal fédéral est irrecevable. Le recourant ne peut en principe exiger qu’il soit statué sur son droit à des mesures provisionnelles urgentes (consid. 1.2).
Divorce ; mesures provisionnelles ; procédure ; contribution d’entretien ; art. 98 LTF ; 176, 179 CC
Effet des mesures provisionnelles. Lorsque la procédure de divorce est retirée, les mesures provisionnelles ordonnées déploient leurs effets tant que les époux demeurent séparés et jusqu’à leur éventuelle modification par le juge des mesures protectrices de l’union conjugale, aux conditions de l’art. 179 CC (consid. 3).
Fixation du revenu du débirentier. Lorsque le juge procède à la détermination du revenu d’une personne en appréciant les indices concrets à sa disposition, il détermine son revenu effectif ou réel ; il s’agit d’une question de fait. En revanche, lorsque le juge examine quelle activité ou quelle augmentation de son activité on pourrait raisonnablement exiger d’une personne et quel revenu il lui serait possible de réaliser, le juge fixe son revenu hypothétique. Rappel des principes permettant de retenir un revenu hypothétique (consid. 5.3.2).
Prise en compte de la charge fiscale. Il est arbitraire de ne pas adapter la charge fiscale du recourant en fonction du revenu effectif estimé (consid. 5.4).
Provision ad litem. D’après la jurisprudence, une provision ad litem est due à l’époux qui ne dispose pas lui-même des moyens suffisants pour assumer les frais du procès en divorce. Le juge ne peut toutefois imposer cette obligation que dans la mesure où son exécution n’entame pas le minimum nécessaire à l’entretien du conjoint débiteur et des siens (consid. 6.1).
Divorce ; mesures provisionnelles ; suspension de la procédure d’appel ; art. 126 CPC
Principe. La décision de suspension de la procédure, au sens de l’art. 126 al. 1 CPC, est une décision de mesures provisionnelles au sens de l’art. 98 LTF, de sorte que seule la violation de droits constitutionnels peut être invoquée (consid. 4.2.2).
Motifs. Selon l’art. 126 al. 1 CPC, le tribunal peut ordonner la suspension de la procédure si des motifs d’opportunité le commandent. A cet égard, le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation ; il prend notamment en considération le besoin de représentation d’une partie. La suspension doit cependant être compatible avec le droit constitutionnel prévu à l’art. 29 al. 1 Cst. d’obtenir un jugement dans un délai raisonnable (consid. 4.2.1).
Divorce ; autorité parentale ; art. 133 CC
Autorité parentale conjointe. Selon l’art. 133 al. 1 CC, sur requête conjointe des père et mère, le juge maintient l’exercice en commun de l’autorité parentale après le divorce, pour autant que cela soit compatible avec le bien de l’enfant et que les parents soumettent à sa ratification une convention qui détermine leur participation à la prise en charge de l’enfant et la répartition des frais d’entretien de celui-ci. On peut s’interroger sur le point de savoir si la seule absence de consentement des deux parents au maintien de l’autorité parentale conjointe est suffisante pour refuser l’exercice en commun de l’autorité parentale. La compatibilité de l’art. 133 al. 3 CC avec les art. 8 et 14 CEDH fait d’ailleurs l’objet d’un recours pendant devant la CourEDH (arrêt 5A_420/2010 du 11 août 2011).
Divorce ; entretien ; art. 125 CC
Principe. Rappel des critères permettant d’allouer une contribution d’entretien après le divorce, selon l’art. 125 CC.
Divorce ; portée du second mariage entre ex-époux ; droit à une contribution d’entretien ; art. 125 CC
Portée du second mariage entre ex-époux. Le prononcé du premier divorce règle définitivement les conséquences liées à l’échec de cette première union. Partant, le second mariage doit être examiné indépendamment du premier, auquel le premier divorce a définitivement mis un terme, en particulier au regard du droit à une contribution d’entretien (consid. 3.1.3).
Droit à une contribution d’entretien. Rappel des critères de l’art. 125 CC.
Entretien de l’enfant ; avis au débiteur ; art. 291 CC
Valeur d’une convention concernant l’entretien. Une convention concernant l’obligation d’entretien approuvée par l’autorité de protection de l’enfant est assimilée à un jugement sur l’entretien et le tribunal n’a pas à revoir l’état de faits à la base de la convention (consid. 3).
Pouvoir d’examen du juge de l’avis au débiteur. La procédure d’avis au débiteur n’a pas pour but d’examiner matériellement les conditions de la convention d’entretien. Le juge n’a pas à considérer si la convention est conforme au principe d’égalité entre les enfants. Son examen se limite aux conditions de l’avis au débiteur (consid. 4).
Divorce ; liquidation du régime matrimonial ; contribution d’entretien ; art. 124, 205 CC
Récompenses. Faute de motivation sur la question de l’abus de droit, il n’y a pas lieu de critiquer la solution cantonale refusant une récompense en faveur des acquêts, suite à la vente par l’intimé d’une participation issue de ses fonds propres à une société figurant dans ses acquêts, qui elle-même est finalement revendue à perte à un tiers (consid. 2.2).
Compensation équitable. Le Tribunal n’est pas obligé d’ordonner l’exécution simultanée du transfert de propriété d’un immeuble avec le versement de la compensation équitable (consid. 4.1.2).
Charges. L’augmentation des charges hypothécaires d’un immeuble visant à payer une compensation équitable ne doit pas être prise en compte dans le calcul des charges de l’époux visant à fixer la contribution d’entretien de l’art. 125 CC (consid. 6.3).
Divorce ; indemnité équitable ; liquidation du régime matrimonial ; contribution d’entretien en faveur des enfants ; art. 124, 204 CC
Principe de l’indemnité équitable. En allouant une indemnité équitable, conformément à l’art. 124 CC, le juge doit prendre en considération toutes les circonstances importantes du cas concret. Le calcul s’effectue en deux temps : premièrement, déterminer le montant de la prestation de sortie virtuelle à partager par moitié entre les époux au moment du prononcé du divorce. Deuxièmement, calculer l’indemnité équitable en suivant le principe selon lequel les avoirs de prévoyance doivent être partagés par moitié entre les époux. Lors du calcul de l’indemnité équitable, il faut spécialement prendre en considération des critères comme les besoins personnels et la capacité contributive du débiteur, ou les besoins de prévoyance du bénéficiaire (consid. 3.3.3).
Taux de change. La décision entreprise se fondait sur un taux de change lissé sur les 36 mois précédant le divorce pour fixer l’indemnité équitable. Or, dans la mesure où l’indemnité est exigible à la date de l’entrée en force du jugement de divorce, la conversion doit s’effectuer à cette date (consid. 3.4.2).
Liquidation du régime matrimonial. Selon l’art. 207 al. 1 CC, les acquêts et les biens propres de chaque époux sont disjoints dans leur composition au jour de la dissolution du régime. S’il y a divorce, la dissolution du régime rétroagit au jour de la demande (art. 204 al. 2 CC). Les sommes versées en l’espèce à l’employée de maison avant le dépôt de la demande en divorce réduisent à juste titre les économies du couples (consid. 5.2.2).
Divorce ; liquidation du régime ; unité du jugement de divorce ; art. 140 aCC
Validité de la convention de divorce selon l’ancien droit. Selon l’art. 140 al. 1 aCC, une convention sur les effets accessoires n’était valable qu’une fois validée par un tribunal. La convention devait figurer dans le dispositif de la décision. Il importe peu que la convention ait été signée avant ou après la procédure de divorce, ou même avant ou après le mariage (consid. 3.2.2).
Unité du jugement de divorce. Conformément au principe de l’unité du jugement de divorce, le tribunal du divorce est exclusivement compétent pour régler les effets accessoires. Une exception peut être faite à ce principe en ce qui concerne la liquidation du régime matrimonial, qui peut être renvoyée à une procédure distincte. Si la liquidation n’est pas renvoyée dans son ensemble, les prétentions afférentes à la liquidation doivent être réglées dans le jugement de divorce (consid. 3.4.1).
Divorce ; moment de la ratification d’une convention de divorce ; révocation du consentement ; art. 279 CPC
Ratification de la convention de divorce passée en audience. Le législateur n’a pas envisagé l’hypothèse de la ratification d’une convention de divorce qui ne serait pas effectuée immédiatement après l’audition des époux et la signature de la convention par ceux-ci, alors qu’une partie déclare se rétracter ultérieurement. Dans cette hypothèse, la jurisprudence et la doctrine admettent qu’un époux peut à tout le moins demander au juge de ne pas ratifier la convention, par exemple en raison d’un vice de la volonté. Il est conforme à l’art. 279 al. 2 CPC de ratifier la convention de divorce dans le futur jugement de divorce (consid. 3.2.1).
Protection de l’enfant ; administration des biens de l’enfant ; art. 318, 324 CC
Mesure préventive. Lorsque l’autorité tutélaire le juge opportun, vu le genre ou l’importance des biens de l’enfant et la situation personnelle des père et mère, elle ordonne la remise périodique de comptes et de rapports à titre de mesure préventive (art. 318 al. 3 CC). Les deux conditions de l’art. 318 al. 3 CC sont cumulatives. Une mesure préventive est indiquée notamment lorsque l’enfant dispose d’un commerce ou d’une grande fortune, qui exige des capacités de gestion particulières, et que les père et mère sont inexpérimentés, influençables, indifférents ou légers dans la gestion des biens. La mesure ne saurait être prononcée que lorsqu’une troisième condition est satisfaite, à savoir lorsque des éléments concrets et objectifs indiquent que le patrimoine du mineur est potentiellement mis en péril par le comportement des détenteurs de l’autorité parentale (consid. 4.1.1).
Mesure protectrice. Si une administration diligente des biens de l’enfant n’est pas assurée, l’autorité tutélaire prononce des mesures protectrices, pour autant que trois conditions soient remplies. Premièrement, les détenteurs de l’autorité parentale n’ont pas adopté une conduite conforme aux art. 399 à 404 aCC ; deuxièmement, leurs manquements ont pour effet d’amener ou de faire craindre le détournement des revenus du patrimoine par leur affectation à d’autres fins que l’entretien et l’éducation du mineur. Enfin, le dommage ou son risque pour le patrimoine à gérer est concret et imputable aux détenteurs de l’autorité parentale (consid. 4.1.2).
But de la mesure préventive. La mesure préventive qui tend à l’information de l’autorité tutélaire au sujet de l’administration des biens de l’enfant, afin d’évaluer la nécessité de prononcer une mesure protectrice, ne saurait être ordonnée simplement pour permettre au débirentier d’une contribution d’entretien de vérifier l’affectation de celle-ci (consid. 4.2.1).
Procédure ; organisation des autorités dans la loi d’introduction à la protection de l’enfant et de l’adulte § 63 al. 1 EG KESR
Juge compétent au sens de l’art. 450 CC. Le Conseil de district (Bezirksrat ; canton de Zurich) peut être le juge compétent (art. 450 CC), c’est-à-dire l’autorité de recours contre les décisions de l’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte, pour autant qu’il respecte les conditions de l’art. 6 CEDH. La conformité à l’art. 6 CEDH s’examine au regard des dispositions cantonales réglant les compétences et l’organisation dudit Conseil (consid. 3.2).
Application au cas d’espèce. Le Conseil de district est un juge au sens matériel du terme et cette solution est conforme à la CEDH (consid. 4.4.5).
Retrouvez tous les arrêts de la newsletter, organisés par mots-clé, sur le site de la faculté.