Droit matrimonial - Newsletter septembre 2015
Editée par Amey L., Bohnet F., Guillod O. et Piffaretti M.
Editée par Amey L., Bohnet F., Guillod O. et Piffaretti M.
Ce nouveau commentaire a pour but de répondre rapidement et de manière concrète aux problèmes rencontrés dans la pratique du droit matrimonial. Chaque disposition du droit matrimonial de fond et de procédure est analysée de manière efficiente et détaillée. Les aspects complexes de droit international privé, qui ont pris une place grandissante dans la pratique, sont également traités dans une annexe. Il en va de même des questions relevant des assurances sociales et du droit fiscal.
Divorce ; garde des enfants ; entretien ; revenu hypothétique ; art. 125, 133, 276 et 285 CC
Refus d’une garde alternée. Bien que l’autorité parentale conjointe n’implique pas nécessairement une garde conjointe ou alternée, le juge doit néanmoins examiner dans quelle mesure l’instauration d’un tel mode de garde est possible et conforme au bien de l’enfant. Le seul fait que l’un des parents s’oppose à un tel mode de garde et l’absence de collaboration entre les parents qui peut en être déduite ne suffit ainsi pas pour l’exclure. Le conjoint qui s’est désinvesti de son rôle de père et a volontairement renoncé à voir ses enfants durant plusieurs mois, ce qu’il justifie en invoquant un « acte de grève » en réaction au « manque de respect et de considération pour sa personne, pour ses enfants et sa place de père » et qui a en outre persisté dans son comportement alors que plusieurs décisions refusant la garde alternée avaient été rendues notamment pour ce motif, fait passer son propre intérêt à obtenir gain de cause avant celui de ses enfants à entretenir des relations régulières avec lui. Dans ces circonstances, c’est à juste titre que l’autorité cantonale a refusé d’accorder la garde alternée au recourant (consid. 4.5).
Entretien. L’autorité cantonale n’a nullement violé les art. 125, 276 et 285 CC en fixant la contribution d’entretien du mari à l’épouse, dans la mesure où elle a prévu des paliers et des limites dans le temps, et compte tenu de la répartition des rôles entre les époux (épouse n’avait pas travaillé durant la vie commune, n’a pas de formation professionnelle reconnue en Suisse et s’occupe des enfants dont le cadet n’a que huit ans). Le mari ne peut pas unilatéralement décider de réduire son activité en prétextant une égalité de traitement avec son épouse (consid. 5.3).
Mariage ; couple ; art. 170 CC
Devoir de renseigner. L’époux qui requiert de l’autre des renseignements doit rendre vraisemblable l’existence d’un intérêt digne de protection. En l’espèce, l’épouse ne peut pas se prévaloir d’un tel intérêt pour exiger la production des pièces relatives aux revenus et aux biens de son époux, dans la mesure où celui-ci a d’ores et déjà admis, dans le cadre d’une procédure parallèle en divorce, pouvoir et vouloir assurer à l’épouse le train de vie mené avant la séparation et qu’il a donc renoncé à tirer argument de sa capacité contributive (consid. 4.2.2 et 4.2.3).
Mariage ; couple ; DIP ; étranger ; enlèvement international ; art. 8, 12 CEDH ; 13, 14 Cst. ; 45 al. 2 ch. 4 CC
Refus de reconnaître un mariage conclu à l’étranger et de le transcrire dans le registre d’état civil suisse. Le droit au mariage (art. 12 CEDH, art. 13 et 14 Cst.) n’est pas absolu et des mesures destinées à lutter contre les mariages de complaisance sont admissibles, pour autant qu’elles soient raisonnables et proportionnées et qu’elles visent à déterminer si l’intention matrimoniale des futurs époux est réelle et sincère, soit repose sur la volonté de fonder une communauté conjugale. La recourante ne parvient précisément pas à démontrer que son union n’est pas un mariage de complaisance, non protégé par l’ordre juridique suisse. En effet, elle ne remet pas en cause le raisonnement de la cour cantonale qui se base sur différents indices, comme la teneur des courriels initiaux, la rapidité de la conclusion du mariage en Turquie, l’absence faussement justifiée de reconnaissance de celui-ci en Iran et la discrétion voulue de la démarche (consid. 3.1 et 3.3).
Mesures protectrices ; entretien ; procédure ; art. 163, 176 al. 1, 278 al. 2 CC ; 52 CPC
Violation du principe de la bonne foi. L’époux qui a renoncé à l’administration d’une preuve, même de manière tacite, ne saurait ensuite se plaindre d’une violation de son droit d’être entendu, sous peine de violer le principe de la bonne foi consacré par l’art. 52 CPC (consid. 2.3).
Prise en compte des enfants issus d’une précédente union. Compte tenu de la convention entre les parties durant le mariage, c’est à bon droit que la juge de première instance a pris en compte dans la fixation des charges de l’épouse le minimum vital des enfants non communs, ainsi qu’implicitement leur participation au loyer. Il ne s’agit pas de faire contribuer l’époux au coût d’un enfant qui n’était pas le sien, mais de tenir compte des charges effectives du conjoint/parent gardien (consid. 3.1).
Mesures protectrices ; entretien ; art. 176 al. 1 CC
Extension du taux d’occupation et revenu hypothétique du crédirentier. Il n’est pas arbitraire de ne pas exiger de la partie crédirentière une extension immédiate de son temps de travail à une occupation à plein temps, lorsque celle-ci est au service de plusieurs employeurs pouvant varier et que le taux d’occupation ainsi que les revenus subissent, de ce fait, des fluctuations (consid. 3.1).
Divorce ; entretien ; art. 125 al. 2 CC
Revenu hypothétique. Le dernier salaire d’une activité à temps partiel ne peut être extrapolé à un salaire équivalant à une activité à 100%, sans prendre en considération les circonstances concrètes et sans se référer aux enquêtes sur la structure des salaires (consid. 4.3.3).Modification d’un jugement de divorce ; procédure ; art. 119 al. 2, 290 CPC
Motivation de la requête d’assistance judiciaire. La requête en modification du jugement de divorce et la requête d’assistance judiciaire sont deux requêtes distinctes. Dès lors, l’art. 290 CPC, selon lequel la demande de modification du jugement de divorce peut être déposée sans motivation, ne s’applique pas à la requête d’assistance judiciaire. En conséquence, même si le recourant pouvait certes introduire une requête en modification du jugement de divorce sans la motiver, sa demande l’assistance judiciaire devait remplir les exigences de l’art. 119 al. 2 CPC, qui prévoit que le requérant doit justifier de sa fortune et de ses revenus et exposer l’affaire et les moyens de preuve qu’il entend invoquer. Ceci d’autant plus que le recourant était en l’espèce assisté d’un avocat (consid. 3.2.3).
Couple non marié ; droit de visite ; art. 29 al. 1 Cst. ; 134 al. 4 et 275 CC
Impartialité de l’autorité de protection de l’enfant. L’impartialité de l’autorité de protection de l’enfant est garantie par l’art. 29 al. 1 Cst. Cette autorité occupe une fonction particulière dans le cadre de la réglementation des relations personnelles entre l’enfant et ses parents divorcés ou non mariés. Elle agit comme un juge du droit de la famille, tout en étant autorité de décision, en principe d’office, dans les cas de mise en danger du bien de l’enfant. Le reproche de manque d’impartialité est, dans le cas d’espèce, infondé (consid. 3.1 et 3.4).
Couple non marié ; protection de l’enfant ; procédure ; art. 308 al. 1, 314a al. 1 CC
Qualité du tiers qui entend l’enfant. Au vu du conflit particulièrement aigu entre les parents, il n’était in casu pas arbitraire de se fonder sur une audition effectuée par la collaboratrice du SPJ, qui avait été nommée par le Juge de paix en qualité de curatrice d’assistance éducative au sens de l’art. 308 al. 1 CC (consid. 3.1).
Contenu de l’audition de l’enfant. L’autorité cantonale a versé dans l’arbitraire en rendant une décision sans que l’enfant, âgé de 9 ans et demi, n’ait été préalablement entendu sur la question de son lieu de vie. La cause est donc renvoyée à cette autorité pour qu’elle entende ou fasse entendre l’enfant sur les éléments pertinents pour la procédure, en particulier ses relations avec ses parents et la question de son lieu de vie effectif (consid. 3.2.2).
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